Array Xavi : Luis Enrique, le Qatar, la Coupe du Monde, les Clasicos, l'Angleterre. Interview fleuve. - FC Barcelona Clan

En Une | Xavi | lundi 14 décembre 2015 à 12:26  | Ajouter aux favoris / Partager  | Email

Au lendemain de leur 4ème victoire en Champion's League en 10 ans, les Barcelonais paradaient à travers la ville sur le toit de leur bus, sur le toit de l'Histoire. Alors que le soleil commençait à se coucher, une foule compacte et déchainée communiait avec l'équipe. Le bus traversait la marée humaine, les joueurs dansaient à l'unisson de leurs fans. Au milieu de cette liesse, un homme attire le regard, assis en retrait au fond du bus, il semble perdu dans ses pensées. Cet homme, c'était Xavi Hernandez. Cinq mois plus tard, rencontre à Doha avec le joueur le plus titré du Barça.

« La dernière fois que je vous ai vu », lui ai-je dit alors que nous nous asseyions, « vous étiez assis à l'arrière du bus de l'équipe le lendemain de Berlin, à l'écart des autres joueurs, perdu dans la contemplation. C'était tout près de la Plaza Letamendi ».

Xavi hoche la tête.

« Je voulais mémoriser autant que possible ce trajet », explique t-il. « C'étaient mes dernières heures en tant que joueur du Barça ; je voulais voir les visages des fans, les applaudir. Je me souviendrai de cette parade jusqu'à ma mort ».

Comment s'est passée votre vie au Qatar jusqu'ici ?

Très bien. Je sens que je suis dans le meilleur endroit possible pour préparer mon avenir dans le football. Le projet avec l'Académie Aspire est fantastique ; les installations sont les meilleures du monde. Je suis allé dans de nombreux centres d'entraînement et celui-ci est, de loin, le meilleur. C'est le désert ici, donc ils ont de l'espace pour tout faire exactement comme ils le veulent et il y a non seulement un terrain d'entraînement pour le football ; mais les meilleurs nageurs et cyclistes viennent ici aussi.

J'ai trois possibilités ici. Une, jouer au football, ce que j'ai fait toute ma vie, même si le niveau est différent de celui auquel j'ai joué. Deux, je peux penser à mon avenir en tant qu'entraîneur ou directeur sportif. J'ai commencé à travailler avec l'équipe des moins de 23 à l'Académie Aspire. Trois, je peux être ici avec toute ma famille. Mes deux frères aînés travaillent à l'académie. Ma sœur est ici avec son mari. Elle travaille dans la logistique à l'académie.

Ma femme est ici, aussi. Elle est enceinte de sept mois et demi de notre premier enfant, une petite fille. Il y a deux vols directs vers Barcelone chaque jour quand la famille doit rentrer, mais nous sommes heureux de vivre ici. J'ai fait mes recherches, nous avons visité ici et j'ai parlé à Raul et à [Pep] Guardiola, qui ont tous deux joué ici.

Il fait plus chaud qu'à Séville en été et les entraîneurs s'en plaignent en Espagne. Comment est-ce de jouer ici ?

Oui, il fait plus chaud ici qu'en Andalousie. Nous sommes maintenant en novembre, c'est le meilleur moment de l'année pour jouer au football. Mais entre août et septembre, c'est terrible. Le climat est brûlant, même quand nous jouons de nuit. Pour moi, c'est le seul handicap de ce pays. Voilà pourquoi il était important que la FIFA déplace la Coupe du Monde 2022 au mois de décembre. Il aurait été impossible de disputer des matchs ici en août. Beaucoup de nouveaux stades auront la climatisation ; le nôtre est déjà équipé à Al Sadd. Les matchs sont joués à 22 degrés, même quand il fait 40 à l'extérieur ; c'est parfait. 

Vous en pensiez quoi lorsque vous avez joué un match en septembre dans un stade sans climatisation ?

C'était horrible, horrible. L'arbitre devait arrêter le match pour que nous puissions boire de l'eau en plein milieu de mi-temps. C'était difficile d'être au niveau, le match était plein d'arrêts. Comme ça, c'est mieux. Maintenant, je vais en profiter.

Quel est le niveau de jeu, lorsque les conditions sont normales ?

Techniquement bonne. Physiquement, les joueurs sont très bien aussi. Ils se préparent bien, ils sont professionnels, les Qataris sont bien physiquement. Tactiquement, le niveau est beaucoup plus faible que celui auquel je suis habitué. Ils font peu d'analyse des adversaires, il y a trop d'espaces sur le terrain. On se croirait à la 80e minute d'un match européen au bout de cinq minutes ici. Donc, ils ont besoin de travailler pour élever leur niveau et je veux les y aider.

Mais il y a d'autres points positifs pour moi. J'ai passé ma vie à voyager avec un groupe, semaine après semaine, j'ai passé beaucoup de temps loin de la famille. Ici, presque tous les matchs à l'extérieur sont juste en périphérie de la ville de Doha. C'est une grande différence pour moi qui avait l'habitude de passer 10 jours loin de mes proches quand j'étais appelé pour les matchs internationaux avec l'Espagne. J'adore la vie tranquille et je peux me concentrer sur le football.

La décision d'attribuer la Coupe du Monde 2022 au Qatar a été extrêmement contestée. Est-ce que ce sera un bon tournoi? (N.D.L.R. : Xavi est un ambassadeur officiel de la Coupe du monde 2022)

Oui, mais il y a beaucoup de travail à accomplir. La circulation est difficile pour le moment ; il y a beaucoup de travaux. Mais ils sont en train de construire une ligne de métro. Les stades seront incroyables et ce qui sera formidable pour les joueurs, c'est qu'ils n'auront pas à voyager pendant le tournoi ; ils pourront rester dans le même hôtel. J'étais au Brésil [en 2014] avec l'Espagne et les vols de longue durée, les changements climatiques étaient terribles. Pour les fans aussi ça sera un avantage, ils pourront rester à Doha et regarder plusieurs matchs par jour. C'est génial pour eux. Économiquement, le Qatar est très bien préparé. Les choses se font ici.

Mais la décision d'attribution du tournoi a été très controversée et il a été avancé que la FIFA était corrompue.

Des enquêtes sont en cours ; c'est une question politique. Ce que je sais, c'est que le Qatar prend très au sérieux l'organisation d'un si grand tournoi et que les gens sont passionnés par le sport. Je pense que le tournoi sera un succès.

Avez-vous reçu des offres pour aller jouer ailleurs après Barcelone?

Oui, plusieurs : la Chine, le Japon, New York surtout à été une piste très sérieuse. L'année dernière, j'étais en contact avec Ferran Soriano (ancien de Manchester City, de NYCFC et surtout ancien de la direction de Barcelone) et nous étions à 90 pour cent d'un accord pour que j'aille jouer à New York. 

Puis, j'ai parlé à Luis Enrique et Andoni Zubizarreta au Barça. Ils m'ont convaincu de rester à Barcelone. Ils ont dit que je devrais profiter de ma dernière année au Barça en tant que capitaine. 

Oh, et Luis m'a dit que nous allions tout gagner la saison dernière. Il m'a dit ça avant même le début de la pré-saison. Le 24 Juillet 2014, il m'a dit : « Réfléchis bien avant de partir, tu es capitaine et nous allons tout gagner ». À ce moment, je me suis dit : « Nous avons un entraîneur très motivé, mais ça ne sont que des paroles en l'air. C'est presque impossible de tout gagner ». Mais j'ai aimé parler avec lui, j'ai eu une bonne impression de lui en tant que manager. Il m'a beaucoup soutenu dans ma dernière année et je me plais à penser que je l'ai aidé aussi.

Berlin a dû être la fin parfaite de ton épopée au Barça.

La meilleure que tu puisses espérer. Bien sûr que j'aurais préférer être titulaire pour la finale, mais j'avais 35 ans, j'ai compris. Je suis rentré pour les 10 dernières minutes et nous avons marqué dans ces 10 dernières minutes. Ce fut une soirée pleine d'émotions. Je suis capitaine et nous avons gagné le triplé. J'étais déterminé à profiter de chaque instant. Je savais que je partais ; j'avais signé le contrat avec le Qatar en février. Je voulais me détendre et profiter pleinement de ces derniers mois.

Que pensez-vous du Barça cette saison ?

Très bien. Je les ai vu jouer des matchs difficiles, mais ils se sont sortis de quelques situations très difficiles dès le début de la saison : Athletic [Bilbao] à l'extérieur, Atletico [Madrid] à l'extérieur, Celta [Vigo] à l'extérieur, Séville pareil. Le Celta a joué incroyablement bien contre le Barça et a mérité de gagner. Le Barça a perdu à Séville, mais méritait de gagner. Ils ont souffert dans beaucoup de matchs, ont été en difficulté, face au Bayer Leverkusen à la maison par exemple, mais ils ont démontré l'esprit qui domine dans l'équipe en revenant au score et réussissant à gagner. J'ai apprécié leurs matchs les plus récents contre Getafe et Bate Borisov.

Ils ont atteint un niveau spectaculaire sans Messi. Busquets est incroyable, Sergi Roberto est extrêmement confiant, Iniesta est revenu à un niveau élevé, Suarez et Neymar sont incroyables. En défense, il y a eu une amélioration. Mascherano est très bon, Vermaelen est bon, Dani Alves, aussi, et Jordi Alba. Ils ont retrouvé de l'intensité défensive, ils pressent haut, ils ne laissent pas de temps à l'autre équipe de réflechir. Le Barça va gagner des trophées cette saison, j'en suis convaincu. Les choses se présentent très bien pour les prochains matchs. C'est une très, très bonne période.

Le premier joueur que vous avez mentionné était Sergio Busquets.

Il est le meilleur joueur du monde à son poste. Il comprend le football, il est ultra-concurrentiel, il trouve des solutions sur tout le terrain. Il joue bien, il ne perd jamais le ballon, il choisit toujours la meilleure option en une passe. J'ai une grande admiration pour lui et je ne dis pas cela parce que c'est un ami très proche.

Vous peignez un tableau optimiste du Barca alors qu'ils ont eu beaucoup de problèmes cette année. Il y a les sanctions contre les nouveaux joueurs jusqu'en 2016 et il y a diverses enquêtes en cours. Ils sont susceptibles de jouer plus de matchs que presque toutes les autres équipes, avec en plus une pré-saison aux États-Unis. Il y a eu aussi des amendes de l'UEFA, sanctionnant les fans qui brandissaient le drapeau de l'indépendance catalane. Et Messi a été blessé.

Oui, tout à fait vrai. Mais vous savez quoi ? Quand les gens commencent à attaquer les Catalans de l'extérieur, ils se réunissent. En fait, c'est mieux pour l'équipe, ils sont plus unis. Le Catalan est une personne tranquille. Il est détendu, il jouit de la vie, il est paisible. Mais l'attaquer, c'est en faire un combattant.

Mais l'équipe joue beaucoup de matchs.

Ces longs voyages préparatoires sont difficiles. La saison dernière, nous avons passé une semaine à nous préparer en Angleterre, ce qui était parfait (au centre de formation national, le parc de Saint George). Le Barça devrait y aller chaque année tant les conditions qu'offre l'Angleterre en juillet sont idéales pour l'entraînement.

Regardez-vous le Real Madrid ?

Oui, je regarde beaucoup de football. Madrid est très fort cette saison. Ils ont une philosophie différente de celle du Barça. Ils travaillent beaucoup sur leur défense, Benitez a amélioré cela. Ils sont très organisés avec deux lignes de quatre. Physiquement, ils sont forts. Et Keylor Navas a été magnifique, prouvant qu'il est un gardien de but de niveau mondial, ce qui n'est pas facile à Madrid, surtout en passant après Iker Casillas. Madrid est un bloc, ils concèdent très peu de buts. Les gens disent que Benitez est un entraineur défensif et effectivement, ils ont concédé moins de buts que les autres équipes. Mais Madrid a également marqué plus que toutes les autres équipes.

Le prochain Clasico sera la premier auquel vous participerez pas depuis 1998 (N.D.L.R. : interview réalisée le 20 Novembre 2015).

Je vais être moins sur les nerfs cette année parce que je suis loin, mais je n'en peux plus attendre. Je suis le Barça, j'espère qu'ils vont gagner, tout gagner. Je pense que les équipes sont d'un niveau similaire si Messi ne joue pas. Madrid a des blessés, mais leurs absents ne sont pas aussi importants que l'absence de Messi. C'est difficile de gagner au Bernabeu et très, très difficile sans lui. Mais je pense que le Barça est dans un bon moment pour faire de bonnes choses au Bernabeu.

À quoi ça ressemble de sortir du couloir du Bernabeu avec 80.000 personnes contre vous en tant que joueur de Barcelone ?

J'adore, c'est ce qu'il y a de mieux, cette rivalité footballistique dans sa forme la plus pure. C'est comme être un gladiateur qui entre dans le Colisée. C'est comme je le disais au sujet des Catalans qui se rassemblent et se défendent quand les gens sont contre eux. C'est l'éternelle rivalité, une sensation merveilleuse, une source d'inspiration, de sentir tout le monde contre vous. Ce n'est pas que du football, c'est comme un village contre le village d'à côté, cela signifie tout pour tous les gens. Et puis vous commencez à jouer, vous marquez et vous ne voyez que 200 supporters tout en haut dans les tribunes. Et vous célébrer ensemble. C'est beau, l'un des meilleurs sentiments dans la vie.

Que pensez-vous vraiment de Madrid ?

J'ai un grand respect pour eux. Ils sont une équipe de gagnants, regardez ce qu'ils ont gagné. Ils sont l'un des meilleurs club monde, à jamais. Ils ont gagné à chaque génération. Les exigences sont élevées et la foule sifflera si elles ne sont pas atteintes. Ce serait impossible pour Madrid de terminer sixième en Liga. Ils sont toujours à la lutte pour les titres, pour gagner, pour faire mieux.

Qu'en est-il de la ville elle-même ?

J'y ai passé beaucoup de temps quand j'étais avec l'équipe nationale. Sur un plan personnel, je m'y sentais bien, tant que les gens me respectaient. Je suis Catalan et je jouais pour le Barça, mais je me suis senti très respecté.

Quels ont été vos meilleurs moments de Clasico ?

Est-ce que vous pouvez imaginez que nous les avons battus 5-0 (2010) et 6-2 à l'extérieur (2009) ? Cette manita a été un triomphe pour la philosophie de Cruyff qui a inspiré le Barça. C'était la perfection.

Est-ce que c'était le plus beau match de votre vie ?

Celui-là et la finale de la Ligue des Champions 2011 contre Manchester United à Wembley.

Vous mentionnez la philosophie du Barca et l'influence de Cruyff. Est-ce que Luis Enrique a changé tout cela?

Non. Mais, avant Messi, nous avions plus le contrôle de la balle, nous faisions plus de passes, plus de jeu. Puis il est devenu le centre de l'attaque. Maintenant, c'est Neymar, Suarez et Messi. Dès qu'ils ont le ballon, ils partent à l'attaque. Donc, il y a un peu moins de possession et un peu plus d'attaques directes. Luis Enrique aime la philosophie Barça de la possession, d'être les acteurs principaux. Luis est un gagnant. Il est honnête, il est un travailleur, il est le coach qu'il faut à l'équipe.

C'est un fan de football. J'ai appris qu'il assiste à des matchs partout dans le monde.

Il l'a fait, il porte une écharpe pour ne pas être reconnu. Lorsque j'aurai le temps, je serais ravi de faire la même chose, mais je pense que ma femme me tuerait. Peux-tu imaginer ? « OK, tu restes avec le bébé pendant trois jours pendant que je vais regarder Liverpool contre Everton » !

Messi est le meilleur de l’histoire ?

Oui. Pelé et Maradona ont tous les deux fait une énorme différence, mais le football a évolué. Les joueurs sont meilleurs que ce qu'ils étaient, le niveau de jeu est plus élevé. Physiquement, tactiquement, techniquement et psychologiquement, le football est meilleur que jamais. Et Messi se distingue comme le meilleur au meilleur moment dans l'histoire du football.

Que pensez-vous de Cristiano Ronaldo ?

Je ne le connais pas personnellement. Nous nous sommes dit bonjour avant la cérémonie du Ballon d'Or, nous avons parlé pendant deux ou trois minutes. Je pense qu'il est une bonne personne, qu'il a une image moins bonne que ce qu’il est en réalité. Il est honnête, peut-être trop honnête et tout le monde n’apprécie pas cela. C’est un exemple de professionnalisme, un grand buteur, un gagnant. Il est l'un des plus grands buteurs de l'histoire du football.

Messi est le plus grand footballeur de l’histoire, mais il ne serait pas aussi bon sans Ronaldo. Il n’aurait pas gagné tous ces Ballons d'Or. Et je ne pense pas que Ronaldo en aurait gagné autant non plus. Ils se poussent mutuellement. La différence entre les deux est que Messi est beaucoup plus impliqué dans le jeu de l'équipe. Ça fait une grande différence.

Comment a évolué Messi en tant que joueur que personne ? Vous ne dévoilez pas grand-chose dans les interviews.

Il a mûri, il est plus responsable. Il est devenu un homme. Il est timide, mais quand vous fait confiance, il se dévoile et c’est une très belle personne. C'est un blagueur, un des plus grands chambreur du vestiaire. Il est plein d'esprit, très ironique dans son humour. Il est intelligent et il est vif. Mais par-dessus tout, c’est un gagneur .

Neymar ?

Un garçon fantastique. Il est Brésilien, il aime la vie. D'autres cultures pourraient ne pas comprendre son humour. Certains croient qu'il se moque de ses adversaires mais ce n’est pas du tout le cas. Il est comme ça tout le temps, dans le vestiaire, à l'entraînement. Lui, Dani Alves et tous les Brésiliens.

Est-ce que la rapidité de l'adaptation de Luis Suarez vous a surpris ?

Non, il arrivait d’un grand club, Liverpool. Maintenant il a Messi et Neymar à ses côtés. C’est quelqu'un qui trouve un moyen d'obtenir quelque chose. Il est très astucieux. C’est un joueur de football du barrio, de la rue, il se bat pour tout, il veut la balle. Il est très intelligent dans sa zone. Il marque énormément. Il a faim de buts. Il me rappelle Eto'o, toujours faim de marquer. Suarez est une grande signature pour le Barça.

Vous avez toujours aimé jouer dans les stades britanniques.

L'atmosphère y est différente, la mentalité différente de celle des pays latins. Les anglais respectent le footballeur. C’est une profession respectée. En Espagne ce n’est pas le cas. Les gens disent : « Vous vivez trop bien, vous gagnez trop d'argent, vous ne travaillez pas ». Ce n'est pas vrai.

Juan Mata m'a raconté une histoire l'an dernier. Il m'a dit que lorsque United a terminé septième (en 2013-14), les fans ont applaudi l'équipe à la fin de la saison. Septième ! Si cela nous arrivait à Barcelone, les fans voudraient nous tuer dans nos voitures ! En Angleterre, ils comprennent. En Espagne, il n'y a aucun respect pour le footballeur.

Pourtant, vous êtes ceux qui raflent un tas de trophées à la fin de la saison. Le Barça a remporté quatre coupes d'Europe lors des 10 dernières années.

En raison de cette pression pour réussir. Vous pouvez démontrer que vous êtes un joueur, puis wooahh ! Jouer pour Barcelone est un examen. À Barcelone, si vous êtes une nouvelle signature, vous devez d'abord démontrer que vous êtes digne de leur soutien. Alors les fans vont vous donner la confiance. En Angleterre, vous l'obtenez avant de commencer. Voilà pourquoi il est plus difficile pour un joueur de s'imposer au Barça ou à Madrid.

Parlons de la Ligue des Champions en demi-finale de 2008.

Ah, vous avez raison. Les derniers jours de Frank Rijkaard. Cétait dommage. Nous n'étions pas en bonne forme physique, et les stars de l'équipe n'étaient pas à leur niveau. Nous avions eu deux années incroyables, mais un changement arrivait. Nous avons aussi eu de la malchance lors de la première manche, le 0-0, à domicile.

Manchester n'en a pas eu non plus. Ronaldo a manqué un penalty.

C'est vrai, mais les deux équipes étaient très proches. Puis un but de Scholes a décidé du sort du match à Manchester. Ce n'était pas un bon moment pour nous.

Ce fut la meilleure ambiance à Old Trafford de ce siècle.

Old Trafford est un endroit incroyable pour jouer. J'y ai fait mes débuts européens en 1998, je ne l'oublierai jamais. Van Gaal allait me faire rentrer au moment où David Beckham a inscrit un coup franc, 3-2 pour United. Je pensais qu'il ne me ferait plus rentrer, mais il l'a fait. Je pensais « Mon dieu, quel moment pour rentrer sur le terrain » ! Alors Nicky Butt a été expulsé. Nous avons obtenu un penalty, Luis Enrique a marqué. United défendait, nous avions la possession.

Je vais vous laisser parler des finales de la Ligue des Champions à Rome et à Wembley en 2009 et 2011.

Ok. United a très bien commencé à Rome. Au début, nous avons pensé, « Cristiano va marquer un but ». Park Ji-Sung était un danger. Nous avons dû nous reposer sur Piqué et Valdès. Ensuite, nous avons eu la balle : Iniesta, passe à Eto'o. But. Ça a changé le cours du match, sa physionomie. Nous avons pris le contrôle à la neuvième minute et nous ne l'avons pas lâché jusqu'à la 90e.

Darren Fletcher était absent.

Un joueur important. Donc United avait aligné Anderson, Giggs et Carrick. Ils ne sont pas aussi physiques. Fletcher nous aurait causé plus de problèmes défensivement. Cependant, il faut noter que de notre côté, il nous manquait Abidal, Rafa Marquez et qu'Iniesta n'était pas à 100%. Nous avons joué avec des joueurs qui n'étaient pas à leurs postes ; Yaya Touré en défenseur central. United étaient le champion d'Europe en titre : Tevez, Ronaldo, Rooney ; Giggs, Carrick ; Ferdinand et Vidic, Evra, Van der Sar… Une très bonne équipe.

Puis, Wembley.

Nous avions vécu trois ans de Guardiola. Il a fait l'histoire. Nous avions l'expérience et l'habitude de gagner. Nous étions spectaculaires. Messi était dans sa meilleure forme de la saison, Iniesta aussi. Je me sentais très confiant.

Rooney a marqué un but superbe à 1-1.

Golazo ! À partir d'une touche : pum, Pum, PUM, but. Il venait d'où ce but ? Parce que nous dominions. J'étais vraiment en colère dans le vestiaire à la mi-temps, jamais on n'aurait dû rentrer au vestiaire à 1-1. Nous avons respecté notre plan de jeu en deuxième mi-temps et nous avons marqué deux fois. Wembley est magnifique.

Voulez-vous devenir entraîneur ?

Je ne sais pas. Ce n'est pas facile. Vous souffrez beaucoup. J'y réfléchis beaucoup ici et je crois que je suis dans un très bon endroit pour ça. Mais j'adore le football. Cruyff est une profonde influence dans ma vie et dans l'histoire de Barcelone, quelqu'un qui me pousse à vouloir faire mieux. Il m'a dit : « Écoutes Xavi, quand tu vas arrêter de jouer, tu vas te rendre compte que la meilleure chose que tu puisses faire pour te sentir le plus proche possible du footballeur que tu étais, c'est d'être entraîneur. Tu ne veux pas être dans un bureau, tu voudras être sur la pelouse. Lorsque je me suis arrêté, je ne savais pas où j'en étais, j'étais perdu. Quand j'ai entrainé, j'ai compris que c'était là que je voulais être ».

J'interviewe des joueurs tout le temps. Vous et Jamie Carragher êtes les plus grands accro au football que j'ai rencontré.

Je suis tombé sur Carragher sur une plage à Ibiza, lorsque nous étions en vacances.

De quoi avez-vous parlé?

De football ! C'est un bon gars, un fanatique. Vous pouvez le voir. Il est revenu en Espagne pour m'interviewer.

Je parie que je pourrais vous poser des questions sur les équipes de niveau inférieur en Espagne et vous aurez les réponses. Ibiza en deuxième division ?

Ibiza est maintenant en troisième !

Barakaldo, une petite équipe basque avec un beau stade ?

Ils sont leaders de l'une des quatre ligues de Segunda B. Regarde (il montre son téléphone), je suis tous les championnats tous les jours.

Alaves ?

Ils jouent les premières places de la deuxième division, Gaizka Toquero a marqué cinq buts jusqu'ici.

Huesca ?

En bas de tableau de deuxième division.

San Andreu (Quatrième club de la division régionale) ?

Milieu de tableau. Ils ont bien commencé. J'ai des amis dans ces clubs, je les suis. Cornella, qui joue à côté de l'Espanyol, en est un autre. Je suis aussi la deuxième division belge, car il ya des joueurs de l'Académie Aspire.

Qu'en est-il des divisions inférieures du football anglais ?

Je suis Middlesbrough parce Aitor Karanka y est. Brighton domine sa ligue. J'ai rencontré un garçon, l'autre jour. Anglais. Il portait un maillot du Barça mais je lui demande qui il supporte. Il a dit: « Sheffield United ». Je les connais, ils ont 20.000 fans. C'est incroyable. Vous n'avez ce soutien qu'en Angleterre. Je regardais un peu un match avec Charlton, l'autre jour. Il y avait du football à la télévision, mais le stade était plein, rempli de supporters. Incroyable. En Catalogne, à un Olot vs Reus,il n'y a que quelques personnes et les familles des joueurs.

 

Après avoir parlé pendant plus d'une heure, Xavi doit partir. Le lendemain soir, il joue pour son équipe dans la Qatari Stars League. Moins de 2.000 personnes viennent regarder Al Sadd dans un stade de 25.000 places.

Bien que peu nombreux, ceux qui sont présents sont passionnés et chantent. Il y a seulement 278 000 Qataris mais beaucoup suivent le football et soutiennent une des 14 équipes de la ligue professionnelle.

Xavi salue sa famille dans la foule, ainsi que l'ancien président du Barça, Sandro Rosell, avant de se concentrer sur le match, qu'Al Sadd gagnera 1-0.

« Certains joueurs viennent ici pour des vacances, mais pas Xavi », confie un responsable du club.

Nous sommes loin de la Plaza Letamendi et du Camp Nou, mais Xavi n'a aucun regret. En outre, il a un travail à accomplir et est totalement concentré. La preuve : il a déjà appris les listes entières des effectifs des 13 clubs rivaux d'Al Sadd.

Merci encore à Joul et Carnot pour les corrections et la relecture.

Source: http://www.espnfc.com/blog/espn-fc-united/68/post/2718752/xavi-discusses-qatar-barcelona-real-madrid-clasico-and-more


Posté par Clément
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