Array Valdés, rien de nouveau - FC Barcelona Clan

En Une | El Soci Opina | mercredi 1 avril 2009 à 21:59  | Ajouter aux favoris / Partager  | Email

Alors que la renégociation de son contrat traîne en longueur, l'omerta sur ses performances a pris fin. Victor Valdés est-il un gardien médiocre de plus, dans la lignée de ceux qui l'ont précédé à ce poste?

Maudits soient-ils !

Il y a quelques jours, alors que je voguais sur le site d’un célèbre quotidien sportif français pour faire court et imprécis, ou sur le site du magazine hebdomadaire en supplément de ce célèbre quotidien sportif français pour faire moins court mais plus précis, je fus interpellé par le sujet « Les gardiens maudits du Barça » et son en-tête accrocheuse « À Barcelone, les boulettes de gardiens sont aussi une tradition ancestrale. Notre Top 5. » Alors que je n’avais sous les yeux que la photo de l’incontournable Carles Busquets, qui en terme de malédiction est aux buts catalans ce que Faust est à Méphistophélès, je me suis imaginé quels pouvaient être les quatre autres gardiens qui pouvaient accompagner le papa de Sergio dans ce fichu « Top 5 ». Je tâtais alors la molette de ma souris de façon à « scroller » vers le bas et me retrouvais déjà confronté à une surprise : Andoni Zubizarreta était désigné deuxième gardien le plus maudit de l’histoire du Barça. Guère convaincu par la justification qui mettait en exergue sa boulette lors du Mondial 1998 plutôt que son rendement avec le Barça des années ans plus tôt, je pressentis l’article superficiel qui élèverait Victor Valdés sur la petite marche du podium. Je vis malheureusement juste et ça m’a foutu en rogne, à un point où cette fois le curseur se déplaçait vers la croix rouge de mon navigateur au grand dam des deux autres gardiens maudits dont je ne désire même pas connaître le nom.

Deux des quatre gardiens les plus capés de l’histoire du club seraient donc deux des plus maudits ? Valdés plus maudit que Victor Baia, Hesp, Arnau, Bonano, Rustu, Dutruel, Reina, Enke alors que pas un seul de ceux-là n’a su s’imposer dans la durée ni même dans l’éphémère pour certains ? C’est là tout le paradoxe du gardien catalan. Décrié comme « de loin le moins bon joueur de l'équipe actuelle » (sic), il pâtit de l’image que de gardiens moins convaincants que lui ont contribué à dessiner sur la « porteria » blaugrana. Valdés est-il la dernière pièce d’un château de cartes, celui des « gardiens assez bons mais pas du niveau d’un club tel que Barcelone », qui s’écroulera en dernier emporté par la fébrilité de ces prédécesseurs et, cela va de soi, par sa propre fébrilité, avant que les dirigeants recrutent enfin un gardien de grand standing ?

Ou est-ce justement quinze années d’expériences malheureuses dans les buts qui le confortent dans sa position et poussera ces mêmes dirigeants à renégocier son contrat. Il est en effet le gardien ayant donné le plus de satisfactions, mais a-t-on le droit de faire un bilan par défaut ? A Barcelone, la devise le mieux est l’ennemi du bien ne s’applique pas dans dix postes sur onze, ailleurs elle ne s’applique pas dans onze postes sur onze. Une différence qui peut parfois changer la destinée d’un club.

 

Valdes

 

Itinéraire d’un enfant du crû.

Âgé aujourd’hui de 27 ans, le natif de l'Hospitalet a intégré le centre de formation à 10 ans, bien qu’il dut aussitôt faire ses preuves à Tenerife pour des raisons d’ordre familial. Il réintègre la Masia trois ans plus tard, et s’impose peu à peu comme un gardien promis à un bel avenir, au même titre que son camarade du même âge Pepe Reina. Si ce dernier arrive plus vite à maturité, jouant quelques matchs avec l’équipe première à 18 ans à peine, il ne parvient pas à convaincre les dirigeants et quitte le club à l’issue de la saison 2001-2002. Valdés ne le sait peut-être pas encore, mais il a désormais le champ libre pour s’imposer.

Première journée de la saison 2002-2003.  Le Barça mène 1-0 contre un Atlético de Madrid euphorique après son retour dans l’élite. Il reste une poignée de secondes avant la pause. Jorge Otero s’engouffre sur le flanc droit et tente un centre-tir anondin. Valdés est trop avancé. Une bourde qui coûte un but, déjà. C'est son premier match officiel, il est jeune, on lui pardonne, il progressera avec le temps. La suite de la saison sera mitigée. En conflit avec Van Gaal, il perd sa place au profit de Bonano et même d’Enke.

L’arrivée aux commandes de Frank Rijkaard constitue un tournant dans la carrière de Valdés. L’ancienne gloire du Milan AC aime son profil. Il apprécie de surcroît ses origines catalanes, pensant qu’à ce poste si particulier il faut privilégier les joueurs du crû. Rustu, tout juste auréolé d’un excellent Mondial, en paie les frais bien qu’il ait également eu sa chance après que son concurrent ait payé un naufrage collectif sur le terrain de Malaga. Le turc ne fut donc guère plus convaincant. La suite, on la connaît : Valdés a de nouveau la confiance du Mister et s’accapare d’un statut de titulaire indiscutable, statut qui ne l’a pas quitté jusqu’au aujourd’hui, avec un point d’orgue de sa carrière une finale de ligue des champions dont il fut le héros. Dans le même temps, il est snobé par les sélectionneurs successifs de la Roja.

Que lui reproche-t-on au juste ?

Si Valdés n’est jamais parvenu à faire l’unanimité après presque sept saisons passées au club, c’est la première fois qu’il fut confronté à une tempête médiatique de l’ampleur de celle qui s’est déclenchée au soir de sa bourde lors du derby barcelonais. Une tempête médiatique qui coïncide avec la seule baisse de régime du groupe cette année et qui tombe bien mal pour lui à l’heure où il doit renégocier son contrat. Valdés, un coupable tout désigné ?

Ses détracteurs mettent en avant ses bourdes, répétitives paraît-il. Cela serait recevable pour celui qui ne regarde le Barça qu’occasionnellement, mais qui suit régulièrement les rencontres des blaugranas peut aisément réaliser que le sobriquet de Calamity Valdés ne lui sied pas, et pas seulement parce que cela sonne faux. Valdés ne fait pas plus de bourdes qu’un autre gardien. En revanche, on a l’impression qu’il « choisit » mal ses moments pour les faire. Deux fois piégé par un même joueur (Villa), trois erreurs lors des trois derniers huitièmes de finale aller de ligue des champions, une erreur dans un derby houleux, c’en est trop pour ceux qui réfutent la thèse de l’accident. Valdés serait-il fébrile mentalement ? Le spectre d’un Ruud Hesp qui offre une balle de but à Tore André Flo dans un match crucial refait surface à chaque fois qu’un gardien catalan est pressé dans un match-couperet, et Valdés ne rassure pas les foules au vu de ses antécédents.

C’est une autre critique qui s’abat sur lui. Ce n’est pas seulement les spectateurs qu’il effraie, ce seraient ses propres défenseurs qui ne croient plus en lui. Valdés gagnerait à être plus autoritaire dans ses sorties, à ne pas se déconcentrer dans ses relances, que ce soit au pied ou à la main. Il y a bien des domaines où Valdés est perfectible, et quand autrefois on fermait les yeux dessus, parce qu’il est jeune, parce qu’il a toujours porté ce maillot, sa marge de progression se réduit inexorablement avec le temps. Après sept années au plus haut niveau, un gardien doit s’être rapproché de la maturité.

Qui plus est, Valdés semble de moins en moins décisif. Plus d’une fois a-t-on vu le Barça encaisser un but sur l’unique occasion adverse. Le dernier rempart est loin d’être toujours responsable, mais c’est aussi sa passivité qui surprend. Quand il se sent battu, il reste cloué sur sa ligne, là où d’autres font quand même l’effort de plonger. Au final ça n’y change rien, sauf miracle, mais c’est moins agaçant pour le spectateur et plus motivant pour les partenaires.

Mais plus que tout, Victor Valdés souffre de la comparaison avec d’autres gardiens, en premier lieu avec Iker Casillas. Et si c’était ça son problème ? Etre né en même temps que le meilleur gardien du monde sachant que ce gardien est de la même nationalité que soi et qu’il défend les couleurs du club honni. Là où l’un maintient une équipe boiteuse à flot grâce à des exploits répétés, l’autre est l’élément le moins valorisé d’une équipe flamboyante.

Valdes

 

Gardien du F.C. Barcelone : un bien dur métier.

Etre gardien de but de haut niveau est un métier bien spécial. Il faut savoir gérer la pression, être concentré à tout moment et accepter  l'idée qu’il existe une hiérarchie difficilement ébranlable. Or à Barcelone, ces trois facteurs sont bien plus importants qu’ailleurs, et mélangés il forment une poudrière explosive.

Jouer au F.C. Barcelone, c’est en effet accepter de supporter les espoirs de toute une région qui ne vit que pour ce club. La pression est partout. Au Camp Nou devant 100 000 socios exigeants, dans la ville où le Barça est un symbole à lui seul, dans la presse sportive locale où chaque fait et geste est décortiqué et passé á la loupe. Valdés a-t-il les épaules assez larges pour supporter une telle pression ? On l’a vu, il a pu craquer dans certains matchs à gros enjeu. En revanche, au Bernabéu en 2004, à Saint-Denis en 2006 ou lors du dernier clasico au Camp Nou pour ne citer que quelques exemples, il a livré des prestations splendides. Ajoutons à cela qu’il est épargné par la presse du fait de sa vie privée raisonnable et de son attachement au club. Ces quelques bourdes et ces buts encaissés sans réagir ne peuvent pas s’expliquer par une simple incapacité à gérer la pression.

En revanche, Valdés donne l’impression que plus il est sollicité plus son taux de réussite est élevé. Il peut s’interposer trois fois devant Henry, une fois devant Hleb, une fois devant Ljunberg dans le match le plus important de sa carrière et se trouer dans un match sans importance où l’équipe adverse n’a qu’une seule occasion. Plus que la question de savoir si Valdés a un problème mental, il faudrait se demander s’il arrive à rester concentré durant 90 minutes quel que soit le danger porté par l’adversaire. Cette question est à considérer pour un gardien quel que soit son club, mais quand ce club est Barcelone elle devient cruciale. L’équipe confisque le ballon, asphyxie l’adversaire par un pressing haut, concède relativement peu d’occasions, en revanche elle s’expose à un jeu plus direct et à des contres meurtriers. Plus que le nombre d’occasions, c’est la dangerosité des occasions auxquelles Valdes doit faire face qui est à prendre en compte. Or si la panthère de l'Hospitalet a des lacunes pas vraiment acceptables à son niveau, notamment sur ses prises de balles, on peut lui attribuer au moins une qualité: pour peu qu’il ne sorte pas mentalement du match, il parvient à quitter rapidement sa ligne et à anticiper les face-à-face avec un instinct rare. C’est un élément qui joue indubitablement en sa faveur à l'heure de peser le pour et le contre.

Enfin, depuis qu’il a vaincu Rustu, sa hiérarchie n’a jamais été menacée. Il est inquiétant d’imaginer que Jorquera, véritable chat noir quand il n’est pas tout simplement mauvais, aurait pu le suppléer s’il avait été blessé ces cinq dernières années. Pinto, s’il a pu s’illustrer de manière épisodique en coupe du roi, n’apparait pas être une solution de rechange sur le long terme. Si Valdés progresse plus lentement que ce qu’on aurait pu espérer vu son potentiel  entrevu à 20 ans, n’est-ce pas également parce que l’absence de concurrence l’a amené à se reposer sur ses lauriers ?

L’été approche…

Dans trois mois s’ouvre le mercato estival et les dirigeants devront faire un des choix suivants, en postulant que si le gardien catalan est conservé ce sera en tant que titulaire :

Si Valdés est conservé dans l’effectif, il faudra se demander s’il doit avoir un remplaçant viable. Pas un concurrent au sens propre, c’est-à-dire un joueur qui le substitue régulièrement, mais au moins un gardien qui pallierait à son absence et qui menacerait sa place en cas de baisse de régime irrévocable. Auquel cas, le club misera vraisemblablement soit sur un bon gardien en fin de carrière, soit sur un jeune amené à prendre la relève de Valdés ultérieurement. Pour ce qui est dudit profil, les noms d’Ustari et d’Asenjo sont régulièrement cités, mais ce ne sont évidemment pas les alternatives qui manquent pour un club comme le Barça.

S’il n’est pas conservé dans l’effectif, il faudra se tourner vers un gardien meilleur que lui. Or de tels gardiens sont pour la plupart sous contrat dans un grand club et donc difficilement transférables. Reina est de ceux-là, et le fait qu’il soit un ancien blaugrana évincé n’arrange pas les choses. La rumeur Petr Cech, qui n’est plus en odeur de sainteté à Londres, est la plus persistante mais aussi la plus fraîche. Elle est donc à prendre avec des pincettes.

Enfin, il se peut que le club estime qu’il n’y ait jamais eu de problème de gardien, ou que ce problème ait été passager, et que rien ne change à ce niveau. Et on verra pulluler les mêmes articles superficiels sur les mêmes sites internet. Rien de nouveau en somme dans les cages du Camp Nou.


Posté par Kill Duckadam
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