Array 2000: Annus Horribilis - FC Barcelona Clan

Chronique | Histoire | vendredi 8 janvier 2010 à 17:37  | Ajouter aux favoris / Partager  | Email

Premier article de la série consacrée à la décennie du F.C. Barcelone (2000-2009). L'année 2000 est marquée par un tourbillon sportif et institutionnel sans précédent, lourd de séquelles pour le club.

 

Le F.C .B., trois lettres, un sigle qui fait référence dans le football mondial. Référence, il l’a certes toujours été, mais plus encore dans ses périodes de gloire. Comme en 2000 où le F.C.B. connaît une période très faste. Sous entendu le F.C Bayern. Le F.C. Barcelone, bien que double champion d’Espagne en titre, en lice dans les trois compétitions, et comptant dans ses rangs plusieurs joueurs de classe mondiale dont les superstars Rivaldo et Luis Figo, est sur le point d’emprunter aux Bavarois leur surnom de F.C. Hollywood, sobriquet qui malgré les apparences n’a rien de glamour.

Le premier rôle de ce mélodrame est tenu par l'entraîneur du club catalan Louis Van Gaal. Si la compétence tactique du Néerlandais fut reconnue au sein d’une génération amstellodamoise exceptionnelle, et s’il enleva deux Ligas, une coupe du roi et une supercoupe d’Europe lors de ses deux premières saisons à Barcelone, Van Gaal est dans l’œil du cyclone en raison de son caractère rigide, de ses méthodes conflictuelles et d'un mode de communication qui ne passe pas. Il lui est en outre reproché de s’être mis à dos plusieurs légendes du club dont certaines (Stoitchkov, Amor) ont été poussées à la porte. Et pour ne rien arranger, il connut deux échecs prématurés en ligue des champions et, beaucoup plus anecdotiques mais tout aussi révélateurs, trois défaites consécutives en supercoupe d’Espagne, compétition dont il se désintéressait totalement.

Dans son sillage, Van Gaal entraîne le mécontentement grandissant des socios vis-à-vis de Josep Lluis Nuñez, président historique du club, en poste depuis 1978, mais contesté pour sa grande intransigeance face aux desiderata des stars et pour avoir limogé l’icone Johan Cruyff en 1996. Autre protagoniste du feuilleton du début de l’année, Rivaldo qui, après avoir raflé les plus prestigieux trophées individuels, a exprimé son désir de déserter le flanc gauche pour une position plus axiale. Van Gaal ayant peu apprécié cette sortie, Rivaldo peut célébrer son statut de meilleur joueur du monde en tribunes contre la Real Sociedad et sur le banc contre le Celta Vigo, match qui le voit néanmoins entrer en cours de jeu pour marquer le but du 2-0. Contre les Basques, l’emblématique capitaine Josep Guardiola inscrit un but contre son camp, sans conséquence pour l’équipe mais qui pèse lourd pour lui au moment où le jeune Xavi Hernandez lui conteste sa place de titulaire.

A la mi-saison, le Barça, habitué à connaître avec Van Gaal des mois de novembre difficiles, est quatrième au classement, sept places devant un Real Madrid en crise et qui a vu son entraîneur Guus Hiddink limogé au profit de Vicente Del Bosque, mais trois places derrière l’ambitieux Deportivo La Corogne de Lendoiro et Irureta. Les Blanquiazules sont à la recherche de leur premier titre de champion, six ans après le penalty raté de Djukic face à Valence qui offrit à la Dream Team de Cruyff sa quatrième Liga d’affilée.

Alors que le Super Depor continue de suivre la route menant à la gloire, pulvérisant le Real Madrid en février (5-2), le Barça subit un contrecoup à domicile face à Alaves (0-1). Il perd de surcroît lourdement le clasico quelques jours plus tard. Clasico marqué par le premier but en Liga de Nicolas Anelka, l'enfant terrible du football français ayant jusqu’ici réalisé une saison chaotique à tous les niveaux malgré un transfert pharaonique. En deuxième phase de poules de la ligue des champions en revanche, le Barça survole un groupe facile (16 points sur 18). Contre Porto (4-2), Rivaldo, résigné à prendre son mal en patience et à jouer selon les consignes du coach, inscrit un doublé dont une superbe échappée au milieu de la défense lusitaine.

 


 

 

Alors que la saison entre dans sa dernière ligne droite, rien n’est gagné ni perdu, même un hypothétique triplé qui n’a jamais été réalisé par une équipe espagnole. Confronté aux Blues de Chelsea dans un quart de finale dans lequel il part largement favori, le Barça subit une tempête à Stamford Bridge, encaissant trois buts dans un intervalle de huit minutes, dont un coup-franc superbement brossé par le maestro Gianfranco Zola. Peu après l’heure de jeu, un Luis Figo en pleine bourre maintient l’espoir pour le match retour (3-1). Match que le Barça doit gagner au moins par 2-0, comme l’indique le gigantesque tifo déployé par un Camp Nou plein comme un œuf. Objectif atteint dès la pause grâce à coup-franc de Rivaldo dévié par Celestine Babayaro (24e) et une frappe enroulée de Luis Figo, reprenant un tir de Kluivert détourné par le montant droit d’Ed De Goey (45e). Une bourde incroyable de Ruud Hesp relance la partie à l’heure de jeu, mais le Barça trouve en Dani, entré dix minutes plus tôt un sauveur providentiel (83e). Les Catalans ont même l’occasion d’éviter la prolongation deux minutes plus tard mais Rivaldo échoue du point de penalty. Il se rattrape en prolongation après qu’Andreas Frisk ait sifflé une faute indiscutable de Babayaro sur Figo, avec en prime le carton rouge pour le Nigérian qui était en position de dernier défenseur. Patrick Kluivert, autre joueur en délicatesse avec Van Gaal, tue finalement tout suspens, ponctuant avec un cinquième but un match exceptionnel par son intensité émotionnelle, entré depuis dans la légende du club.

 

 

 

 

 

Malheureusement, le Barça a entre temps sérieusement compromis ses chances dans les autres compétitions, chutant lourdement à trois reprises par le même score (3-0), à domicile face à Majorque et à l’extérieur face au modeste Oviedo d’un Delly Valdes en verve, et enfin à Vicente Calderon en demi-finale de la coupe du roi face à un Atletico pourtant très mal en point. Le match retour donnera lieu à l’un des plus grands scandales de l’histoire de la compétition puisque, privé de la plupart de ses internationaux en raison d’une distorsion entre le calendrier de la RFEF et celui des sélections, Van Gaal décide de faire l’impasse sur ce match plutôt que de convoquer des jeunes de l’équipe réserve. Seuls douze joueurs de l’équipe première (dont deux gardiens) sont convoqués, et le Barça déclare forfait au lieu de disputer une rencontre perdue d’avance. Le club est éliminé sur tapis vert et risque même l’exclusion des prochaines éditions de la coupe.

Loin de se soucier de ce remue-ménage, Van Gaal se focalise sur les deux autres compétitions qui, à vrai dire, l’intéressent beaucoup plus. Retrouvant ses internationaux, il prend sa revanche sur l’Atletico dans les jours qui suivent (0-3 à Madrid). La défaite du Deportivo dans le derby galicien lui permet de revenir à deux points à trois journées du terme. Mais le Barça doit enchaîner avec une demi-finale capitale face au F.C. Valence, solide collectif entraîné par Hector Cuper et emmené par un formidable Gaizka Mendieta. Qui plus est, Valence lui fait subir des misères depuis quelques années, en particulier le vif contre-attaquant « Piojo » Lopez, toujours très prolifique face aux Blaugranas. Le vainqueur de la double confrontation se disputera le titre avec le Bayern ou le Real Madrid, revitalisé par l’arrivée de Del Bosque et l’éclosion du jeune gardien Iker Casillas. Pour la première fois de l’histoire de la compétition, trois clubs d’un même pays sont donc dans le dernier carré et la Liga s’impose comme le championnat le plus relevé du monde, à la fois grâce à ce qu’on aurait appelé aujourd’hui un Big Four et grâce à son homogénéité qui explique les résultats parfois surprenants des quatre gros dans les compétitions domestiques.

 

Mais la demi-finale aller est un cauchemar. Le Barça est littéralement baladé à Mestalla. A l’image de son vétéran Amadeo Carboni, 35 ans, Valence asphyxie son vis-à-vis par son agressivité et mène logiquement 1-0 puis 3-1 peu avant la pause. En deuxième période les Chés procèdent en contre, et dans ce registre c’est évidemment Claudio Lopez qui administre le coup de grâce aux Catalans en toute fin de match (4-1).

 

Alors que retourner la situation semble très difficile pour ne pas dire impossible, le Barça tente de conserver ses dernières munitions pour le championnat. La Corogne apparaît à bout de souffle mais Barcelone l’est encore plus. Une défaite 2-0 à domicile face au Rayo Vallecano, un club de la banlieue de Madrid aux ressources limitées, le condamne au miracle. Il trouve toutes les peines du monde à s’imposer lors du match retour de ligue des champions (2-1), sans pour autant retourner la situation sur les deux rencontres, avant d’être neutralisé dans un match sans but sur le terrain d’une Real Sociedad qui lutte pour son maintien. Lors de l’ultime journée du championnat, les dirigeants promettent des maletinas aux joueurs de l’Espanyol s’ils font tomber le Deportivo au Riazor, leader avec trois points d’avance. En vain puisque si les Galiciens s’imposent sans trop de difficulté face aux voisins du Barça (2-0), ce dernier termine la saison en roue libre au Camp Nou face aux voisins de La Corogne, le Celta Vigo (1-1).

 

Avec cette saison vierge de titre malgré un effectif de qualité, la tête du mal-aimé Van Gaal est demandée et obtenue par des socios furibonds. La vox populi va plus loin puisqu’elle lynche également le président Nuñez, lequel renonce, sous la pression, à ses fonctions. Des élections sont convoqués dans la foulée, avec comme principaux candidats l’influent bras droit de Nuñez, Joan Gaspart, et le représentant du changement Lluis Bassat. Dans la liste de ce dernier figure un certain Joan Laporta qui s’était préalablement fait un nom en étant l’un des deux initiateurs de la motion de censure (dite Elefant Blau) contre Nuñez en décembre 1997. Gaspart, dont l’âpreté en négociations l’a rendu populaire, l’emporte avec près de 55% des suffrages.

Au même moment se déroulent des élections similaires à Madrid, et le candidat sortant Lorenzo Sanz doit, malgré le titre de champion d’Europe fraîchement remporté, rendre des comptes de sa gestion économique désastreuse. Il fait face à l’ambitieux roi du BTP Florentino Pérez qui, en plus de proposer de vastes ajustements financiers, promet aux socios l’arrivée de Luis Figo, l’un des principaux favoris au Ballon d’Or et qui dispute un Euro où il fait parler tout son talent. Las d’attendre une revalorisation salariale, Figo voit son avenir hors de Barcelone, malgré des déclarations n’allant pas dans ce sens. La Lazio de Cragnoti est sur le coup, mais c’est le Real Madrid qui tient la corde, surtout quand Florentino Perez est élu avec plus de 3000 voix d’écart. A peine investi que Joan Gaspart doit lui céder le meilleur ailier du monde pour un transfert record (60 millions d’Euros), somme que le Barça réinvestit presque en totalité dans deux joueurs d’Arsenal, Marc Overmars et Emmanuel Petit pour respectivement 39,6 et 12,2 millions d’Euros. Lorenzo Serra Ferrer est quant à lui chargé d’entraîner le club pour débuter la saison 2000-2001.

 

 

 

Début de saison qui doit se faire sans Pep Guardiola, gravement blessé dix jours avant le coup d’envoi de la Liga. C’est l’occasion pour Xavi de s’imposer comme le maître à jouer de l’équipe, du moins progressivement parce qu’il ne prend pas part à la démonstration en ligue des champions face à Leeds United (4-0) en guise de revanche de la demi-finale de 1975. Le Barça prend ainsi le meilleur départ possible mais la suite de la compétition sera pénible. Il fait preuve de lacunes défensives étonnantes face au Beşiktaş de Nihat, et de bonnes interventions du nouveau gardien Richard Dutruel ne peuvent éviter une humiliation (3-0). Il perd complètement pied à domicile face au Milan A.C. (0-2), et un match nul à San Siro (3-3) grâce à un Rivaldo extraordinaire (deux coups-francs ahurissants et une tête plongeante qui font mouche) ne l’arrange pas outre-mesure. En outre, il compte déjà deux défaites en cinq matchs de championnat, et s’il reste sur une victoire très large (0-6) à San Sebastien, il ne part pas forcément favori au moment d’accueillir le Real Madrid.

 

Les retrouvailles de Figo avec son ancien public sont houleuses. Celui que la Catalogne appelle Judas est accueilli avec des insultes, des banderoles, des poupées gonflables à son effigie et des projectiles en tout genre. Mais c’est sur le terrain qu’il se fait le plus maltraiter, étant totalement contenu par le fougueux latéral Carles Puyol. A l’image de son ailier star, le Real Madrid subit la loi des Catalans et des buts de Luis Enrique, ancien de la Maison Blanche et habitué à punir un club qu’il ne porte plus dans son cœur, et du jeune Portugais Simao Sabrosa viennent sceller ce clasico (2-0). Dans la foulée, les blaugranas doivent assurer leur avenir en C1. Ils arrachent miraculeusement un match nul à Leeds (1-1), Rivaldo se déjouant de ses gardes du corps grâce à un geste technique de très grande classe avant de tromper enfin un excellent Paul Robinson dans les dernières secondes de la partie. La prestation de Robinson contraste par ailleurs totalement avec celle de Dutruel, annoncé en grande pompe comme le gardien qui manque au Barça depuis le départ d’Andoni Zubizarreta, et auteur d’une faute de main en début de match que son équipe faillit payer très cher. Et même si la défaite le condamnait, le Barça n’a pas pour autant son destin entre ses mains. Un nul à Milan suffit en effet à Leeds pour s’adjuger la deuxième place qualificative du groupe. Match nul qui a malheureusement lieu. Le Barça, malgré une large victoire contre Beşiktaş, est éliminé à ce stade de la compétition pour la troisième fois en quatre ans. Il est repêché en coupe de l’UEFA, payant son inconsistance dans cette poule. Inconsistance qui se traduit également en championnat puisque malgré une série de sept matchs sans défaite, il parachève une année décevante à la quatrième place du classement. 

 

 


 

 


Posté par Kill Duckadam
Article lu 10845 fois