Array Messi, un génie cartésien : le fond avant la forme - FC Barcelona Clan

En Une | Messi | mercredi 17 février 2016 à 11:28  | Ajouter aux favoris / Partager  | Email

La grande force de l’Argentin sur le terrain est que, bien avant le spectacle, il cherche avant tout la meilleure solution possible à chaque fois. Du pragmatisme à l'état pur.

Vous rappelez-vous ce match où Messi a marqué d’une insolente bicyclette ? Non ? À vrai dire, moi non plus. Essayons encore une fois : qu’en est-il de la fois où il a marqué à 40 mètres des cages ? Le fait est que je n’en ai aucune idée, et j’espère que vous aussi parce que Messi n’a jamais marqué un but comme ceux-ci. Bien sûr, ce pourrait être une simple coïncidence qu’aucune réalisation, parmi les centaines inscrites par Messi dans sa carrière, n’entre dans ces descriptions. Mais pour moi, ce n’est pas le cas. Ces observations soulignent en fait un aspect fondamental chez La Pulga. Cet aspect constitue d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles on peut parler de vrai génie quand on le regarde jouer. En fait, il nous renseigne sur la rationalité propre au jeu de l’Argentin.

Pour parler de Messi et de sa façon de jouer, les gens utilisent une multitude de termes : magicien, extraterrestre, génie, incroyable ou encore magistral. Mais rien de ce que je vais évoquer ici ne ressemblera à ces mots. Il est vrai que le jeu de Messi est souvent (et j’insiste : très souvent) spectaculaire. Mais en même temps, l’affirmation suivante est tout aussi valable : il n’est jamais plus spectaculaire que ce qu’il faut.

En philosophie, la rationalité caractérise un comportement dont l’émanation est influencée par l’usage de la raison. Appliquée à l’ordre de la pratique, elle forme le raisonnable. Concrètement, ce terme nous renvoie au domaine de la pure cohérence, du maîtrisable, de l’intelligible, et de la logique. Cela vaut également pour Messi. Quand l’Argentin fait quelque chose de spectaculaire, il y a toujours une fin, un but derrière. Ce n’est jamais pour le geste lui-même. S’il peut marquer un but facile, il le fera. S’il y a une passe évidente à faire, il la fera. S’il dribble quatre adversaires, c’est parce que c’est la meilleure option qui se présente à lui. Soyez sûr qu’il ne tentera pas cela s’il y a quelque chose de raisonnable à faire à côté. Si vous le voyez marquer des buts après avoir éliminé six joueurs, je vous garantis que c’était la meilleure chose à faire pour lui. Mon opinion est que Messi ne complique jamais les choses. C’est juste un génie. Mais un génie sans folie. La Pulga est plutôt un rationnel : le pragmatisme avant, le spectacle après.

Quand on regarde des matchs où apparaissent de grands joueurs du passé, on se rend compte que la plupart d’entre eux étaient sensiblement différents. Pelé, par exemple, était un joueur qui tentait souvent l’impossible. Et comme c’était Pelé, il réussissait de temps en temps. Maradona, sur quelques matchs, ressemblait aussi à ça. Il n’y a pas si longtemps, je regardais quelques matchs que Diego lui-même avait qualifiés comme étant ses meilleurs. Mais même durant ces rencontres, il prenait beaucoup de mauvaises décisions : faire le spectacle, tenter l’impossible, quand il y avait une solution plus simple et plus appropriée pour remplir le même objectif.

Plus récemment, on pourrait citer Ronaldinho pour illustrer ce propos. De toute évidence, tous les Culés aiment Ronnie et oui, c’était un footballeur extraordinaire. D’ailleurs, quand on regarde ses meilleurs moments sur YouTube, on pourrait penser qu’il était aussi bon que Messi. Mais ce n’était pas le cas. Et il en était même loin. La raison principale réside dans le fait que Ronaldinho n’est pas aussi pragmatique que l’est Messi. Bien sûr, à ses sommets, c’était un joueur qui pouvait créer des moments d’euphorie et faire gagner des matchs. Mais pour cela, il avait besoin de tenter l’impossible plusieurs fois durant un même match. Et le plus souvent, quand il essayait, il n’allait pas au bout. Pas parce que ce n’est pas un bon footballeur, mais parce que c’est tout simplement impossible. Pas impossible au sens littéral du terme, mais extrêmement difficile, et aucun footballeur ne peut avoir un taux de réussite de 100 % dans ces moments-là. La magie de Ronaldinho avait un prix. Pas Messi.

À certains moments, le style de jeu de Cristiano Ronaldo représente l’exact opposé de celui de l’Argentin. Pensez par exemple au grand nombre de frappes qu’il tente durant un match. Certaines d’entre elles, de par leur angle ou leur distance, font que la possibilité de marquer est très faible. Mais Cristiano tente ces frappes quand même, même si ce n’est pas la chose la plus rationnelle à faire. Essayer de marquer plusieurs fois à 30 mètres des buts peut, à la fin, n’entraîner qu’un seul et unique but. Mais cela peut cependant embellir les compilations YouTube et cacher d’autres soucis tout aussi importants. La plupart des gens sont en effet prêts à oublier les dizaines (voire les centaines) de fois où ces frappes n’aboutissent qu’à une perte de balle. Ces pertes comptent aussi ! Faire une chose égoïste plutôt que pragmatique fait de vous un joueur moins bon car cela handicape votre équipe, ne l’oubliez jamais !

Messi est différent. Pas seulement parce qu’il tente rarement ce qu’il y a de compliqué quand il y a une meilleure option qui se présente. Son pragmatisme peut se voir dans presque tout ce qu’il fait. Pensez par exemple à sa finition. À titre d’illustration, on pourrait prendre son but au Camp Nou face au Bayern Munich qui permit au Barça d’ouvrir le score lors de la Ligue des Champions 2008/2009. Sa finition est la définition même de la rationalité : il envoie calmement le ballon dans le coin opposé du but et le gardien n’a aucune chance de l’atteindre. Il y a cependant dix centimètres d’espace entre l’endroit où le ballon franchit la ligne et le poteau, juste pour s’assurer que la sphère doit bien arriver à l’endroit voulu. Tout cela est très simple et très efficace en même temps : une précision presque mortelle. Et il y a de la beauté dans cette simplicité. Le fond avant la forme. L’efficacité avant le spectacle.

Et sa technique de dribble ? Spectaculaire, bien sûr. À couper le souffle, évidemment. Mais elle contient très peu de fioritures. Y a-t-il des flips-flaps ? Des elasticos ? Des talonnades ? Difficile de trouver trace des ces gestes dans le passé (il devrait peut être commencer à faire ce genre de chose dans un grand match ? Personne ne s’y attendrait et l’effet de surprise serait garanti). Quoi qu’il en soit, pour Messi tout se concentre en un contrôle maximum sur le ballon, des changements de direction, et sur le fait de jouer sur les failles de l’adversaire en faisant toujours ce dont il s’attend le moins (feintes, crochets). Même le petit pont qu’il tente régulièrement a une certaine simplicité. Après tout, cela reste la façon la plus directe pour éliminer un adversaire.

Vous voyez, pour tout son talent et pour toutes les choses dont il est capable, on peut affirmer que Messi est un vrai diplômé de la Masia, le football simple par excellence. En effet, le football simple reste le plus dur à exécuter. La raison est elle aussi très évidente : c’est le meilleur football qui soit. Messi, en bref, est Maradona, mais avec du pragmatisme à la place de la folie. Et c’est pourquoi je pense qu’il est très peu probable qu’il marque d’une bicyclette ou d’un but à 40 mètres dans un avenir proche. Parce que la plupart du temps, tenter ces choses revient à tenter quelque chose d’irrationnel. Une hérésie pour Messi. Une chance pour le Barça. Parce que l’Argentin est et restera toujours rationnel.


 

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Posté par Senox10
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